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Le Bocio

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Les Fon sculptent dans le bois les Bocio à l’aspect souvent rudimentaire et brutal recouverts à la surface d’une multitude d’éléments, cordes, ossements, coquillages, cadenas, perles, ou divers métaux  investis de pouvoirs particuliers. Les éléments qui entrent dans sa composition ainsi que son mode de fabrication sont déterminés par le devin après consultation de son commanditaire. Simples objets, les bocio, s’ils ne reçoivent pas leur « charge magique » par adjonction d’ingrédients, rites, mythes et paroles. Souvent de tailles réduites et transportables , ils n’ont pas vraiment de sanctuaires et sont entreposés un peu partout dans une habitation. Ceux qui présentent une base pointue en bois, sont fichés dans le sol devant des bâtiments, maisons ou temples. Ces sculptures sont des « leurres » pour capturer le mal et apporter protection et sécurité. On attend donc des Bocio des résultats ponctuels immédiats, précis et éventuellement agressifs. On s’en sert pour éviter le mauvais sort, se protéger des maladies, repousser de mauvais esprits, sortir vainqueur d’une querelle, obtenir la faveur d’une femme ou de son patron, s’attirer des clients, humilier un rival, blesser ou faire périr un ennemi, ou pour s’opposer à des actions de ce genre dont un sujet est victime.

Le mot bocio en Fon vient de « cio » le cadavre et de « Bo »,  qu’on traduit par « charme » ou encore « médecine ». Le bocio est donc un charme qui détourne des cadavres et donc de la mort (il comporte ainsi des ingrédients thérapeutiques) qui l’accomplit en « charmant » l’esprit des ancêtres défunts et qui redevient un simple objet sculpté (un cadavre) quand le charme a disparu. Une autre signification renvoie au ficus (bo-ti ou arbre bo) dont l’écorce est utilisée pour la fabrique de cordelettes (bo-k’a). L’action du bocio serait donc de lier, nouer, capturer la puissance, le souffle vital pour résoudre une situation (conjurer une attaque de sorcellerie par ex). On n’en aperçoit jamais que la garniture extérieure. Les éléments essentiels sont enfouis et beaucoup de bocio se trouvent enduits d’un mélange de suie, d’argile, d’huile de palme, d’œuf cassé et de sang sacrificiel, ce qui leur donne un aspect noir et luisant.

Ainsi la pensée « thérapeutique » vaudou postule que certaines combinaisons de végétaux ou de racines ont une vertu sur les maladies diverses parce qu’ils enferment déjà une combinaison de souffles vitaux, comme s’ils gardaient la trace du monde originel. Ces « médecines » constituent d’ailleurs tout un savoir traditionnel et empirique de la maladie mis en œuvre par des guérisseurs et devins mais qui ne seraient rien si on ne les « animait pas » par des rituels et incantations destinés à agir sur le souffle. Ainsi pour guérir un mot de tête, on fait bouillir des plantes, après avoir tracée sur chacune le signe divinatoire odu ; on boit le breuvage deux fois par jour en prononçant diverses formules (l’intonation est essentielle) comme « ne permets pas qu’il sente la douleur ! »Ou le « bananier est toujours frais et calme !» .Outre l’administration de plantes médicinales, se met ainsi en jeu une « influence qui guérit » en  charmant  ainsi l’esprit du patient par la vertu de paroles.

Ce sont ces « médecines » accompagnées des même rituels, récitation des mythes qu’on enferme dans les bocio avec l’idée que le nouage sera cette fois plus fort que la simple voix comme le symbolisent par exemple les diverses cordes et cadenas.

 

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